Le 27 octobre 2024 est une belle journée ensoleillée à New York. Il n’y avait pas un nuage dans le ciel lorsque la foule s’est rassemblée pour le rassemblement de Donald Trump prévu plus tard dans la soirée au Madison Square Garden. Tous ces gens étaient là pour voir Donald Trump s’exprimer dans le stade à guichets fermés qui peut accueillir un peu moins de 20 000 personnes, « l’arène la plus célèbre du monde », selon son propre slogan publicitaire. Et ceux qui n’avaient pas de billets semblaient plus qu’heureux d’être là, parmi les gens de leur bord, à regarder ce qui se passait dans l’arène sur des écrans disposés à l’extérieur.
Je suis arrivé vers midi, quelques heures avant que Trump ne prenne la parole à 17 heures. Et je n’étais pas du tout la première personne présente. La file d’attente faisait déjà le tour du pâté de maisons, depuis l’arène jusqu’à la 34e rue en passant par la 8e avenue, où elle s’étirait jusqu’à l’entrée de Penn Station. Les rues avoisinantes étaient fermées et pleines d’autres personnes qui regardaient et attendaient. Les cordons de police empêchaient de se déplacer dans la zone et je suis donc restée principalement sur la 8e avenue.
La ville de New York est profondément démocrate, dans un État qui l’est tout autant. Et ce n’est pas ce rassemblement qui va changer la donne. Il y a des poches de partisans de Trump dans les cinq boroughs de New York et les banlieues environnantes, mais ils ne sont certainement pas aussi nombreux que les démocrates de l’État. Mais Donald Trump, sa liste d’orateurs l’accompagnant et ses partisans sont venus malgré tout.
La foule partisane de Trump paraissait réjouie de se retrouver en territoire hostile, neuf jours à peine avant l’élection présidentielle, alors que la photo de leur candidat s’affichait sur l’écran géant situé sur le côté de l’édifice. Elle était accompagnée d’une pléthore de vendeurs d’articles Trump, ironiquement pour la plupart noirs et bruns par rapport aux manifestants majoritairement blancs. Ils vendaient de tout, des chemises aux chapeaux, en passant par des drapeaux et des figurines. Les affaires semblaient florissantes parmi ceux qui faisaient la queue. Et quel que soit l’endroit où l’on regardait, c’était une mer de casquettes rouges de Trump, fait rare dans cette ville. Le rassemblement de Donald Trump au Madison Square Garden de New York ressemblait ainsi à un carnaval dystopique à guichets fermés.
Les partisans de Trump étaient accompagnés d’un contingent de manifestants de toutes origines et de tous horizons. Portant leurs propres pancartes, accompagnés de chants et de musique, ils faisaient entendre leur opinion politique et leur opposition à Trump et ses partisans. Un groupe se trouvait principalement de l’autre côté de la 8e avenue, à l’écart de la foule qui attendait pour entrer dans le rassemblement sur la 33e rue, tandis qu’un grand groupe s’est installé sur les marches du Moynihan Train Hall, juste en face du Madison Square Garden.
Les deux camps ne se sont pas beaucoup mélangés, étant séparés à la fois par la 8e avenue et par les nombreux policiers présents pour maintenir l’ordre. De temps à autre, une personne d’un côté ou de l’autre se rendait vers le côté opposé, essayant d’attirer l’attention de ses opposants politiques. Certains partisans de Trump prenaient manifestement plaisir à porter leurs drapeaux et leurs pancartes devant les manifestants qui se trouvaient devant le hall du train et à se faire huer et crier dessus. Ils souriaient et riaient en faisant cela, comme des enfants qui s’en sortent en faisant quelque chose en dehors du champ de vision de leurs parents.
Quelques-uns des partisans de Trump, lorsqu’ils passaient devant moi, criaient des phrases du type « fake news » ou « ennemi du peuple », ainsi qu’à tous les autres journalistes qui se trouvaient dans leur champ de vision. Quelques menaces plus explicites ont été proférées, principalement à propos de ce qui arriverait après l’élection à ceux qui protestaient contre Trump. Comme me l’a fait remarquer un ami photographe, ces menaces sont les plus troublantes, car on ne peut juger de leur sincérité et dangerosité. Une rhétorique qui imite le langage sombre, dystopique et parfois violent de Trump lui-même, et ses griefs perçus à l’encontre de tous ceux qui, selon lui, l’ont offensé.
Trump se présente comme le seul à pouvoir lutter contre le « l’ennemi intérieur » qui opère activement contre lui et ses partisans, pour ainsi sauver l’Amérique. Et ses partisans le soutiennent à 100 %, presque comme dans un un culte. En revanche, ceux qui protestent contre lui et ce qu’il représente le considèrent comme une brute, un criminel condamné par la justice américaine et un dictateur en puissance qui s’emploie activement à détruire tout ce qui fait de l’Amérique un pays de libertés.
L’Amérique est profondément divisée, tout comme ceux qui sont venus à New York ce jour-là. Le rassemblement au Madison Square Garden, et ce qui a été dit à l’intérieur cette nuit-là, pourrait s’avérer être un moment décisif dans cette élection. Seul l’avenir nous le dira.