Inauguration du nouvel espace du Center for Photography at Woodstock

Ce centre de photographie à but non lucratif inaugure son nouvel espace dans l’État de New York, aux États-Unis, avec quatre expositions qui explorent non seulement des enjeux culturels et sociaux historiques, mais mettent également en lumière les tendances actuelles de la photographie à travers les travaux créatifs de la communauté de Kingston et de la vallée de l’Hudson.

Situé à 145 km au nord de New York, le Center for Photography at Woodstock (CPW) a été fondé en 1977 par Howard Greenberg et Michael Feinberg, alors tous deux photographes. Initialement installé dans la ville de Woodstock, le CPW s’est forgé au fil des années une réputation prestigieuse en proposant de belles expositions, des formations, des installations pour tirer ses photographies, des conférences et des tables rondes, ainsi qu’une bibliothèque et une collection photographique.

En 2022, le CPW a déménagé à Kingston, une ville à 15 minutes en voiture, au cœur de la vallée de l’Hudson River. Son nouveau siège, l’ancienne usine de cigares Van Slyke & Horton, inaugure aujourd’hui la première phase de sa rénovation sous la direction du cabinet d’architecture Lopergolo + Bartling Architects. « C’était une expérience incroyable de travailler avec le CPW pour concrétiser leur vision d’un espace transformé au cœur du centre-ville de Kingston », déclare Erin Bartling, co-fondatrice de Lopergolo + Bartling. « Avec la fin de la première phase, le 25 Dederick Street prend vie grâce à la richesse de la programmation du CPW. Nous avons hâte de poursuivre notre travail et d’offrir de nouvelles opportunités à la communauté locale, aux artistes, aux visiteurs et aux amateurs d’art dans les prochaines années. »

Le CPW à Kingston, NY © Eduard Hueber / archphoto.com

Le premier étage de l’usine rénovée comprend dorénavant 600 mètres carrés d’espace d’exposition. Le deuxième étage abrite un laboratoire média numérique élargi avec des imprimantes haut de gamme et des installations de production pour la création de livres d’artistes, des ateliers, des bureaux, des salles de réunion, un salon pour les visiteurs, ainsi que la bibliothèque du CPW (plus de 3000 ouvrages) et sa collection de photographies rassemblée sur près de 50 ans (environ 4 500 images).

Pour son inauguration, le CPW présente quatre expositions explorant la photographie sous toutes ses formes et styles.

La première exposition est célèbre: « Mary Ellen Mark: Ward 81 ». En 1975, alors qu’elle photographie le tournage du film Vol au-dessus d’un nid de coucou, Mary Ellen Mark rencontre plusieurs femmes résidant dans le service psychiatrique Ward 81 de l’hôpital d’État de l’Oregon à Salem. Avec la thérapeute et écrivain Dr. Karen Folger Jacobs, elle retourne alors dans cet hôpital psychiatrique de haute sécurité pour documenter la vie des patientes. Elle en ressortira des photographies magnifiques d’humanité, et des enregistrements audio de ses entretiens. Au total, elle passera 36 jours dans l’hôpital pour produire un récit poignant de leur réalité quotidienne. L’exposition, organisée par Gaëlle Morel et Kaitlin Booher, est accompagnée du livre Ward 81: Voices, publié par Steidl en 2023.

Carol T. dans le miroir, 1976 © Mary Ellen Mark, avec l’aimable autorisation de la Fondation Mary Ellen Mark et de la Howard Greenberg Gallery
Mona avec une photo de Michael Douglas, Ward 81, Salem, Oregon, 1976 © Mary Ellen Mark
Mona et Beth dans la douche, pavillon 81, Oregon State Hospital, Salem, Oregon, États-Unis, 1976 © Mary Ellen Mark
Laurie dans la baignoire du pavillon 81, Oregon State Hospital, Salem, Oregon 1976 © Mary Ellen Mark

La deuxième exposition est intitulée « My Sister, My Self: Photographs by Colleen Kenyon and Kathleen Kenyon » (Ma sœur, mon moi : photographies de Colleen Kenyon et Kathleen Kenyon). Ces images célèbrent les sœurs Kenyon, qui ont co-dirigé le CPW pendant près de 25 ans. Leurs œuvres des années 1970 et 1980 reflètent un engagement féministe marqué par des approches novatrices de la photographie. L’exposition, organisée par Tom Wolf et Laurie Dahlberg, présente leurs images emblématiques, de la photographie colorée à la main aux collages et collaborations artistiques.

« J’étais intéressée par la manière dont leur travail reflète le féminisme tel qu’il était articulé à cette époque, et comment elles l’abordent dans leurs œuvres », explique Dahlberg. « Colleen Kenyon réfléchit à la difficulté de se situer dans un contexte où les féministes de son entourage rejettent les notions de beauté et d’esthétique féminine, alors qu’elle s’y intéressait en tant qu’artiste. Elle insistait sur son identité féministe, tout en brisant ces restrictions. De son côté, Kathleen adoptait davantage une critique des médias, du sexisme et du racisme omniprésents à l’époque, en s’appropriant le matériel imprimé du post-guerre, saturé de stéréotypes hétéronormatifs blancs, pour en révéler les messages sous-jacents et les détourner. »

Colleen et Kathleen, New Paltz, New York – 1978 © Colleen Kenyon
Colleen et Kathleen, Mt. Tremper, New York – Août 1979 © Colleen Kenyon
Colleen et Kathleen, Shady, New York – Décembre 1979 © Colleen Kenyon
Kathleen – Minnewaska, New York – Janvier 1977 © Colleen Kenyon
Composition avec une balle, 1990 © Colleen Kenyon

La troisième exposition est « Keisha Scarville: Recess ». Lauréate du prix Saltzman 2024, Scarville s’intéresse à la diaspora et à la perte à travers ses images. Elle crée des photographies qui interrogent la notion d’appartenance, en utilisant des vêtements et textiles ayant appartenu à sa défunte mère. Des espaces, des scènes et des natures mortes sombres qui invoque la présence de sa mère. « Pour cette exposition, je voulais réfléchir à ce que l’ombre renferme en tant qu’espace liminal, non seulement d’un point de vue formel, mais aussi métaphorique. L’ombre obscurcit, délimite l’espace et offre un terrain d’exploration plus profond. Je voulais réunir des images qui interrogent ces zones d’obscurité et de transformation, où l’accent n’est pas tant mis sur la lumière que sur ce que l’ombre révèle et comment elle façonne l’image », explique Keisha Scarville.

Ces trois expositions sont visibles jusqu’au 4 mai 2025.

Shadow Archive, 2024 © Keisha Scarville, Courtesy the artist and Higher Pictures, New York
Empty Clap, 2016 © Keisha Scarville, Courtesy the artist and Higher Pictures, New York
Negotiating [front slash] Maneuver, 2020 © Keisha Scarville, Courtesy the artist and Higher Pictures, New York
Seawall Water, 2024 © Keisha Scarville, Courtesy the artist and Higher Pictures, New York

S’y ajoute, enfin, une autre. « Free, For All » (Gratuit, pour tous) inaugure la Galerie Communautaire du CPW, un nouvel espace dédié à la mise en valeur de la photographie locale. L’exposition comprend 213 œuvres sélectionnées lors d’un appel à contributions en janvier. « Nous voulions offrir une opportunité ouverte à tous », explique la commissaire Marina Chao. « Toute personne présentant une œuvre prête à accrocher a été incluse. L’engouement a été tel que nous avons dû organiser deux présentations successives. » Cette première partie de l’exposition se termine le 16 février 2025, suivie d’une seconde série de 150 œuvres.

Avec cette réouverture et une programmation photographique prometteuse, le CPW est en passe de devenir un pôle culturel majeur dans le quartier artistique de Kingston, s’inscrivant dans le Plan Directeur des Arts et de la Culture de la ville, initié en 2022. Le projet a déjà bénéficié de plus de 2 millions de dollars de financement de l’État de New York. « C’est une étape enthousiasmante qui transforme le CPW, autrefois une petite galerie à Woodstock, en un acteur culturel essentiel pour Kingston et la vallée de l’Hudson », déclare Brian Wallis, directeur exécutif du CPW. « La réhabilitation élégante de notre bâtiment historique est le fruit de trois années de travail acharné par notre équipe dévouée, nos architectes talentueux, notre conseil d’administration et la communauté de Kingston. Nous pouvons désormais proposer des programmes passionnants, à la fois ancrés dans notre communauté et pertinents à l’échelle mondiale. »

Le Center for Photography at Woodstock est situé au 25 Dederick Street, à Kingston, NY. Les galeries sont ouvertes du jeudi au dimanche, de 11h00 à 17h00. L’entrée est gratuite.

Suivez le CPW sur Instagram @cpw_kingston | Facebook cpw.kingston | YouTube @cpw_kingston | X @cpw_kingston.

Plain Girl, Husband on the Loose © Kathleen Kenyon
Untitled, ca. 1995 © Kathleen Kenyon
Untitled © Colleen Kenyon

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