De la guerre en Ukraine en passant par les 75 ans de l’agence Magnum ou une plongée intime au cœur d’Athènes, voici dix trésors photographiques autour de la photodocumentaire et du photojournalisme.
1/ Thierry Clech, Sunset On Ukraine
Des instants de légèreté, des sourires, des étreintes… Thierry Clech a sillonné l’Ukraine durant l’été 2013, trois mois avant le soulèvement de Maïdan, « sans bien sûr me douter que ce serait le dernier été que connaîtrait ce pays dans son intégrité territoriale ». Les plages d’Odessa ou de Crimée sont bondées de touristes russes et ukrainiens, les enfants jouent dans les parcs et sur le sable, dans une insouciance estivale… Par l’écrit et l’image Thierry Clech montre que cet équilibre est pourtant bien fragile et que les prémices du conflit à venir se font déjà sentir. De ce reportage au long cours le photographe a rapporté 73 films, soit plus de 2 600 vues, pour finalement sélectionner les 76 photographies de ce livre.
Sunset On Ukraine, 128 pages, 78 illustrations, éditions Snoeck, textes de Thierry Clech, Français, Anglais, Neerlandais, 19cm x 21cm, 28€.
2/ Guillaume Herbaut, Ukraine, terre désirée
Autre ouvrage marquant sur le conflit russo-ukrainien, celui du photographe français Guillaume Herbaut. Depuis 20 ans, il n’a jamais cessé de sillonner l’Ukraine. Ukraine, terre désirée est le résultat de ce travail. Pour la troisième fois de sa carrière, Guillaume Herbaut a reçu le prestigieux prix World Press Photo 2022. Ce livre permet de comprendre les racines du conflit actuel et la complexité du territoire que le photographe arpente depuis toutes ces années. Il a suivi la révolution Orange en 2004, le Donbass, la Crimée en 2008, la révolution Maïdan en 2014 jusqu’à la guerre débutée le 24 février dernier. « L’Ukraine était partagée, avant l’invasion russe, en différentes zones : des zones contaminées, des zones de guerres mais aussi, à l’époque, des zones de paix, comme un miroir du futur de nos sociétés. D’une guerre oubliée aux images d’un conflit déstabilisant le monde et s’affichant en Une de tous les journaux, on découvre un peuple se levant et se battant pour sa liberté. Une raison qui me pousse à continuer. »
Ukraine, terre désirée, Guillaume Herbaut, éditions Textuel, 216 pages, 25cm x 27cm, 140 images, 49€.
3/ Magnum Photos 75 ans
Magnum Photos fête cette année ses 75 ans. Cet ouvrage retrace l’histoire de la célèbre agence photo à travers ses photographes mais aussi et surtout par les petites histoires qui se cachent derrière les grandes images de notre temps. De Mai-68 au 11-Septembre 2001, en passant par la guerre du Vietnam et les conflits plus récents, le lecteur découvre les coulisses d’une photo devenue iconique ou encore les anecdotes personnelles des photographes. La particularité de l’ouvrage est de parler de photographies sans jamais les montrer directement. Il faudra au lecteur déplier les premières et dernières pages du livre pour découvrir les images cachées à l’intérieur.
Magnum Photos 75 ans, version française et anglaise, textes Philippe Séclier, Relié, 13,5 x 21,5 cm, 104 pages, 106 textes, 32€.
4/ Le coin BD, Magnum Génération(s)
Les 75 ans de Magnum se célèbrent aussi en BD avec Magnum Generation(s). Les planches de bande dessinée, où des photographies d’époque se mêlent aux dessins, emmènent le lecteur dans l’aventure de l’agence et auprès des grands noms qui ont marqué le photojournalisme du XXe siècle. « Magnum est une communauté de pensée, une qualité humaine en partage, une curiosité de ce qui se passe dans le monde, un respect de ce qui s’y passe et le désir de le transcrire visuellement », déclarait Henri Cartier-Bresson, cofondateur de l’agence Magnum Photos.
Magnum Generation(s), auteur : Jean-David Morvan, dessinateurs : Rafael Ortiz, Scietronc, Arnaud Locquet, coloriste : Hiroyuki Ooshima, Magnum Photos, Caurette édition, 21cm x 28cm, 248 pages, 29,90€.
5/ Chris Killip, Skinningrove
C’est une histoire humaine et de marins. Skinningrove, petit village planté sur la côte nord-est de l’Angleterre, abrite une communauté soudée de pêcheurs. Entre 1982 et 1984 le photographe Chris Killip est allé à leur rencontre. « Comme beaucoup de communautés de pêcheurs soudées, elle pouvait être hostile aux étrangers, surtout à ceux qui avaient un appareil photo », racontait Killip. « Les pêcheurs de Skinningrove croyaient que la mer devant eux était leur territoire privé, à eux seuls. » Le photographe a mis 30 ans avant de se décider à en faire ce livre à part entière tant il avait du respect pour ces personnes. Publiée pour la première fois en 2018 sous la forme d’un journal qu’il a personnellement et anonymement glissé dans toutes les boîtes aux lettres du village, cette nouvelle édition Steidl comprend une introduction du photographe et des photos encore inédites : elle a été achevée peu avant la mort de Killip, en octobre 2020.
Chris Killip, Skinningrove, éditions Steidl, 104 pages, 50 images, 30 x 20 cm, Anglais, 50€, prévu pour décembre 2022.
6/ Christopher Anderson, Marion
Le photographe Christopher Anderson a commencé à photographier sa famille comme un père ordinaire, pour garder des souvenirs. Jusqu’au jour où le photographe Tim Hetherington voie une photo qu’Anderson avait prise de sa femme Marion et dise « cette photo parle du temps qui passe ». Anderson a alors réalisé que ces photographies étaient, en fait, l’œuvre de sa vie. Son nouveau livre, Marion, marque le dernier chapitre d’une trilogie de livres qui relate leur vie et leur amour. « Cela n’a jamais été une sorte d’exercice créatif. Les photographies sont des expressions de l’amour… un enregistrement de cette expression. Elles sont plus que des souvenirs », confie Christopher Anderson.
Marion, Christopher Anderson, éditions Stanley/Barker, 160 pages, 22 x 25 cm, 47,95€.
7/ Niko J. Kallianiotis, Athenai, In Search of Home
Athênai, In Search of Home est un retour aux sources pour le photographe Niko J. Kallianiotis. Il s’agit de la suite de la première monographie du photographe grec, America in a Trance, réalisée en Pennsylvanie, devenue sa deuxième maison pendant 20 ans. Ici, il retrouve une ville qui a profondément changé au même titre qu’elle reste familière à ses yeux. Son objectif se promène dans les ruelles, à la périphérie de la ville, à la rencontre des habitants pour offrir un portrait intime de la capitale grecque.
Athenai, in search of home, Niko J. Kallianiotis, Damiani, 30,5 x 21,6 cm, 119 pages, 35$.
8/ Fred de Casablanca, Les Mains patientes
C’est un projet photographique d’une grande tendresse que propose Fred de Casablanca à travers le livre Les Mains patientes. Depuis 2017, ce médecin généraliste demande à quelques-uns de ses patients avec qui la confiance est suffisamment forte s’il peut photographier leurs mains. Le noir et blanc et le plan serré, la position de la paume et des doigts… ils révèlent les traces du temps qui passent, les individualités, les histoires personnelles. A côté des images, les patients livrent un petit morceau de leur vécu et offrent un témoignage de vie très touchant. Une belle preuve en image du lien particulier entre le médecin et ses patients.
Les Mains patientes, éditions Le Bec en l’air, 112 p., 35 €.
9/ Goran Tomasevic
C’est une bible du photojournalisme, signée par un photographe qui couvre les zones de conflits depuis près de 30 ans. Le serbe Goran Tomasevic, né en 1969, est une figure du reportage de guerre. Membre depuis 1996 de l’agence Reuters, il n’a cessé de parcourir les tragédies du monde, suivant les traces de Robert Capa et de James Nachtwey. Il publie un livre référence de 256 photos et 444 pages, témoin de son incroyable carrière débutée dans les années 1990 lors de l’éclatement de la Yougoslavie. Récompensé à de nombreuses reprises pour son engagement dans les Balkans, en Irak, en Afghanistan, en Libye et en Syrie, il couvrira aussi le Soudan du Sud, le Pakistan, le Mozambique ou encore le Nigeria et même les Jeux olympiques.
Goran Tomasevic, éditions Lammerhuber, 256 photos, 29 × 31 cm, 444 pages, Anglais, Français, Allemand, 59€.
10/ Décadrage colonial
C’est un chapitre méconnu de l’engagement des surréalistes et de l’avant-garde artistique des années 1930 que traite le livre Décadrage colonial. L’ouvrage revient sur cette réaction d’artistes au moment de l’exposition coloniale internationale à Vincennes en 1931, créant une exposition parallèle titrée « La vérité sur les colonies » et dénonçant la politique coloniale de la France, notamment par la photographie. Le livre s’attache en parallèle à montrer le rôle du médium dans la représentation de l’exotisme, à travers la collection du Musée national d’art moderne.
Décadrage colonial, édition Textuel, 192 pages, 160 photographies, 45€.