« C’est un incubateur, une aide à la production, à la préparation du projet. » Ainsi Julien Jourdes, créateur de Plena Productions, décrit-il son projet. Après des années comme éditeur photo pour de grands médias comme The Wall Street Journal, The New York Times ou Newsweek, il décide d’aider à la création documentaire.
Avec Blink, qu’il cofonde en 2013 avec Matthew Craig, Julien Jourdes met en relation les éditeurs de presse avec les journalistes sur le terrain. Avec Plena Productions, créée en 2023, il fait le pari d’aller au-devant de nouveaux talents, et souhaite mettre en avant le style documentaire et le fait de s’instruire. « Il y aura toujours une volonté documentaire, l’idée d’avoir une certaine objectivité pour documenter ce qui se passe dans le monde », précise-t-il.
Et malgré les mutations dans le domaine, qu’il sait inéluctables, l’ancien journaliste ne s’inquiète pas de l’avenir de ce support. « Le genre ne va jamais disparaître. Il y a des formes documentaires qui risquent d’évoluer, mais moi, je ne suis pas là pour en défendre la forme », s’explique-t-il.
Aide à la production
C’est le principe d’un incubateur. Plena Productions vient en aide « aux réalisateurs, aux photographes et journalistes » mais aussi « aux artistes et chorégraphes ». Pour Jourdes, le principal est l’aspect documentaire du travail réalisé.
Il prend l’exemple d’un danseur. Imaginons un artiste, qui souhaite « créer un spectacle de danse et s’inspirer de mouvements propres à une tribu en Amazonie colombienne. Il peut faire une demande pour une bourse afin de voyager là-bas, passer quelques semaines avec eux et faire une recherche documentaire sur les mouvements de cette tribu ».
Il en va de même pour les photographes. Un travail documentaire leur permet de prétendre à différents types d’aides. La première est monétaire. Il s’agit du « nerf de la guerre », pour Julien Jourdes.
Cette aide se traduit par deux bourses : la Paloma Pioneer Grant Awards et la Talia Transformation Fund d’un montant respectif de 20 000$ et 2 000$. Elles permettent aux jeunes photographes ou vidéastes de financer la réalisation du documentaire, les déplacements, le logement, et tous les coûts annexes qu’ils ne seraient autrement pas en mesure d’assumer.
« Il y a aussi une aide matérielle, en équipement. C’est-à-dire que l’on fournit des objectifs de cinéma, des caméras Sony … », explique le créateur de Plena Productions. L’entreprise investira régulièrement. « Si les garanties sont données, ils ont accès aux équipements. »
Enfin, Plena fournit aussi l’accès à une salle d’enregistrement sonore 4K. « Elle se situe à New-York, dans un superbe loft », précise Julien Jourdes. Différentes productions sont déjà prévues sur place, afin de mettre en avant des jeunes photographes et réalisateurs d’Amérique, d’Afrique et d’ailleurs. « C’est aussi cela que l’on offre : un espace de projection et de rencontre culturelle. »
Découverte de talents
« Garder un jour dans la semaine pour la découverte de nouveaux talents » : voilà ce que lui demandait Sarah Harbutt, directrice adjointe au New York Times. « Cela fait partie de notre métier. Et notre métier fait partie de cet écosystème où l’on découvre de nouveaux talents », lui disait également la fille de Charles Harbutt, l’ancien président de l’agence photo Magnum. Une habitude que l’ancien journaliste a gardé, des années après, et juge toujours autant nécessaire.
Le magazine Newsweek, comme Julien Jourdes s’en souvient, disposait de 5 000 $ par semaine à distribuer à de jeunes confrères et consœurs. « L’idée était de découvrir (de nouveaux talents) mais aussi de pérenniser, d’allumer une flamme, tout ça à base de fonds documentaire. »
Cette époque, marquée par la fin du « Golden Age » du journalisme, de la vidéo et de la photographie documentaire, semble profondément ancrée chez Julien Jourdes. « Aujourd’hui, et je suis désolé de taper sur les doigts des gens, des producteurs, photographes et vidéastes, mais ils oublient la nécessité d’incubation, de découvrir de nouveaux talents, de donner un peu de son temps professionnel pour découvrir d’autres acteurs de ce secteur », s’indigne-t-il. Et il précise qu’il ne s’agit pas d’y consacrer la semaine, aucune formule magique n’existant sur le sujet.
La pérennité du genre documentaire dépend, pour lui, de la communauté et d’une pensée innovante. C’est pourquoi il propose ce nouveau système d’aides, qui participe à la découverte de nouveaux talents et accompagne la production.
Afin de prendre part à la pérennité des documentaires, Plena production présente le documentaire “La Calle Pura” réalisé et produit par Alfredo Chiarappa et organise une levée de fonds pour réunir la dernière partie du budget. On y suit Brian, un chanteur de reggaeton de 22 ans vivant à Cuba, dans sa quête d’émancipation musicale. Le jeune homme recherche sa place dans ce monde en mutation.
La levée de fonds aura lieu le 27 octobre 2023 à 19h, au nouveau studio de Plena Production, au 77 Avenue Washington, 3ème étage, Brooklyn, New-York 11205.