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Fire Island, dans les années 1950 : l’île gay

Une nouvelle exposition nous entraîne à Cherry Grove, célèbre ville balnéaire de l’état de New York, et revisite le quotidien de la communauté LGBTQ au milieu du siècle passé, alors que les émeutes de Stonewall n’ont pas encore eu lieu.

Harold Seeley
Diaper Party, II, 1951, Collection d’archives Cherry Grove, don de Harold Seeley
Harold Seeley
Parasol Party, 1951, Collection d’archives Cherry Grove, don de Harold Seeley

Située sur l’île de Fire Island, Cherry Grove fut l’une des toutes premières villes gays des États-Unis, que la communauté LGBTQ adopta dans les années 1950 comme destination estivale et de weekend, bien avant les émeutes de Stonewall, événement souvent considéré comme le premier exemple de la revendication homosexuelle. Il faut rappeler qu’à l’époque, l’homosexualité est vue à la fois comme un crime et une maladie mentale, Cherry Grove représente donc un refuge, où l’on peut savourer les plaisirs de la vie en toute liberté, à l’abri de toute persécution.

Membres du collectif Cherry Groves Archives Collection, Brian Clark, Susan Kravitz et Parker Sargent ont rassemblé 70 photos grand format et objets de collection pour l’exposition Safe/Haven: Gay Life in 1950s Cherry Grove, véritable fenêtre sur ce chapitre extraordinaire de l’histoire américaine. Les scènes se passent à la plage, dans des théâtres, des lieux d’expositions, au bar du Duffy’s Hotel, à la régate annuelle ou encore au bal costumé de fin de saison, où les fêtards peuvent ouvertement bafouer la loi et se travestir. Arrivant à point nommé pour le Pride Month, ce parcours est un hymne à la puissance de la joie, de l’amour et de la résilience.

Paul Jablonski
Men on the Beach, ca. 1950, Cherry Grove Archives Collection, don de Paul Jablonski

« La haine et l’homophobie ont contraint les homosexuels à vivre dans le secret afin d’assurer leur sécurité et réputation », explique Brian Clark. « Il est capital de préserver notre histoire gay et de mettre en lumière nos conditions d’existence de l’époque. Nous souhaitons rendre hommage aux anciens de notre communauté, en racontant la vérité sur leurs joies et leurs peines, et mettre à l’honneur leur précieuse contribution pour créer un monde meilleur . »

Amour et fierté

Dans les années 1930, les personnalités du monde des arts et des lettres, de la danse, de Hollywood et de Broadway affluent à Cherry Grove, pour échapper au tourbillon étourdissant de New York. La rumeur se répand dans la communauté homosexuelle et en vingt ans, les lieux deviennent une oasis protégée du monde extérieur. « L’endroit est devenu la destination pour quiconque souhaite explorer sa sexualité et remettre en question les rôles de genre traditionnels », raconte Susan Kravitz. « À cette époque, on pouvait bronzer sur la plage dans le plus simple appareil, et s’éclipser dans les dunes pour une brève aventure sexuelle. »

End of Season APCG Ball, Community House, Woman with Headdress, septembre 1954, Collection d’archives Cherry Grove, don de Harold Seeley
Patricia Fitzgerald, Kay Guinness, Mary Ronin, and Bea Greer, Duffy’s Hotel, ca. 1950, Collection d’archives Cherry Grove, don de Gay, Nathan et Julie Paradise

Des auteurs connus tels que Christopher Isherwood, Patricia Highsmith, Carson McCullers et Tennessee Williams se rassemblent à Cherry Grove, et Truman Capote y a écrit en partie sa célèbre nouvelle, Breakfast at Tiffany’s, depuis Carrington House en 1957. Mais ce ne sont pas les célébrités qui donnent tout son éclat à l’exposition. Ce sont plutôt les gens ordinaires qui, en vivant leur véritable identité au grand jour, avec courage, ont semé les graines dont le Gay Liberation Movement est né.

« Quand je regarde les photos de l’exposition, j’ai souvent l’impression de voir des gens que je connais aujourd’hui, avec cette même lumière dans les yeux, les mêmes sourires, les mêmes expressions extraordinaires », raconte Parker Sargent.

Hot House, 1958, Collection d’archives Cherry Grove, don de Harold Seeley
Patricia Fitzgerald and Kay Guinness, Cherry Grove Beach, septembre 1952, Collection d’archives Cherry Grove, don de Gay, Nathan et Julie Paradise

« En tant que femme trans, je sais à quel point il est difficile de trouver des lieux dans lesquels on puisse se sentir à l’aise. C’est pour moi un enchantement de voir ces femmes et ces hommes homosexuels vivre et s’assumer pleinement, à une époque où il était dangereux d’affirmer son homosexualité. Le simple fait de voir cette bravoure est une source d’inspiration. On nous offre ici des instants de liberté sociale et d’intimité affective, et c’est précisément ce que nous sommes si nombreux à rechercher dans nos propres vies, quelle que soit notre identité sexuelle. »

Par Miss Rosen

Miss Rosen est une journaliste basée à New York. Elle écrit sur l’art, la photographie et la culture. Son travail a été publié dans des livres, des magazines, notamment TimeVogueAperture, et Vice.

« Safe/Haven: Gay Life in 1950s Cherry Grove », jusqu’au 11 octobre 2021. The New-York Historical Society. 170 Central Park West, New York, NY 10024, USA. Plus d’informations ici.

Weekend Guest at Hot House, 1958, Collection d’archives Cherry Grove, don de Harold Seeley
Young Man Posing for Polaroid, 1959, Collection d’archives Cherry Grove, don de Don Steeple
Outside of Bea Greer’s Home, Bea’s Brunch, 1951, Collection d’archives Cherry Grove, don de Harold Seeley
Ed Burke in Ethel Merman’s Mermaid Costume, One Hundred Club Party, 1949, Collection d’archives Cherry Grove, don de Harold Seeley
One Hundred Club Party, 1949, Collection d’archives Cherry Grove, don de Harold Seeley

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