Il fait chaud, il fait moite dans les images du livre Canicule de Laurent Reyes, on sent la température qui monte, les corps qui transpirent, l’appel de la mer. Le photographe capture son quotidien, ses amis et « son environnement immédiat ». Au début de son ouvrage, il écrit ces quelques mots : « Et puis le temps, la température, l’air se figent. Ce n’est pas si désagréable. On bronze, on flirte, on s’étourdit. Je la laisse me bercer de sa moiteur familière. Je m’y attache comme un amour vache » suivi, un peu plus loin, de cette interrogation : « Et s’il ne se passait rien ? »
Corps dénudés, baignades improvisées, soirées qui s’éternisent jusqu’à l’aube, Laurent Reyes montre un monde d’insouciance. Pour immortaliser ces moments de vie, le photographe préfère l’argentique au numérique, il le marque même sur la page d’accueil de son site internet : « Sans être phobique de l’ordinateur, je privilégie l’argentique dès que je le peux. » Il utilise des « appareils aux formats différents, souvent compacts et capricieux, avec des résultats incertains. »
Le flash s’enclenche trop tôt ou trop tard, il est parfois défectueux, une fuite de lumière s’immisce sur la pellicule, les images sont en noir et blanc ou en couleur et la variété des supports est telle que l’inconnu est un leitmotiv chez le photographe. « Je m’écarte des préconisations au gré de l’humeur ou d’une intuition. La surprise sera toujours de mise, avec des révélations jubilatoires et des images aussi inconsistantes et malmenées que les vies que nous traversons » écrit-il.
Au milieu de ses photographies, son journal intime est publié. Jour après jour, on lit ses amours d’un soir, ses soucis de santé, on le suit dans ses voyages. On va et vient avec lui, sans trop savoir pourquoi ni comment, mais on se laisse bercer par cette douce chanson. Jean-Christian Bouyrcart, photographe de sujets intimistes, lauréat du Prix Nadar, du Prix Niepce ou encore du Prix du Jeu de Paume, résume au mieux cette série de Laurent Reyes à la fin du livre : « Il y a une esthétique un peu trash, limite punk, qui parle bien de notre époque où faire de belles images devient comme une insulte au réel si peu sûr de lui-même. La force de la composition tient grâce au fil suggestif et émotionnel. (…) (Laurent), c’est un beatnik du XXIe siècle. »
Canicule de Laurent Reyes est publié aux éditions Arnaud Bizalion, 204 pages, 32€.