En 1963, le photographe William Klein fait ses valises et monte dans un avion à destination de l’Afrique occidentale. À travers le Niger et le Sénégal, Klein braque son objectif sur des habits et des paysages aux couleurs vives, sous une lumière mielleuse, alors qu’il est en commande pour le magazine masculin britannique Town et le Weekly Telegraph. Plusieurs des images qu’il a prises sont publiées à l’époque, mais la plupart de ses photographies d’Afrique resteront sous forme de négatifs et de diapositives, emballés et cachés dans un entrepôt de son studio parisien.
Après s’être rendu au studio de William Klein, le galeriste new-yorkais Howard Greenberg s’est souvenu avoir vu des tirages de Dakar et demande à l’assistant de Klein de les parcourir. Rapidement, Greenberg se retrouve face à des photographies en noir et blanc et en couleur qui n’ont jamais été dévoilées : aujourd’hui, ces images sont exposées pour la première fois dans une exposition intitulée « William Klein : Afrique » à New York.
Bien que William Klein soit surtout connu aujourd’hui pour ses photos de mode en noir et blanc, l’exposition présente une nouvelle facette de son travail avec ces images d’Afrique. Son œil de photographe de mode est palpable, mais ici, il joue avec la mise au point et des flous, choisissant de mettre en valeur les arrière-plans et de laisser les premiers plans incertains.
L’une des images les plus frappantes est celle du défilé de l’indépendance du Sénégal, à Dakar en 1963, qui montre un groupe de femmes vêtues de robes et de bandeaux vert tilleul. La rangée de femmes au premier plan est floue : il n’y a qu’une seule femme, quelques rangées plus loin, dont le visage est parfaitement net. L’effet est proche de celui d’une peinture (ce qui n’est pas surprenant, puisque Klein a suivi une formation de peintre, auprès de Fernand Léger), les couches de tissu vert tendre ayant des allures de coups de pinceau. Parmi les tons verts et bruns apparaissent des éclats métalliques, lorsque les anneaux dorés qui ornent les oreilles des femmes captent la lumière du soleil.
Un autre cliché du défilé joue avec la même dynamique. Les hommes en tenue militaire, avec leurs gants blancs et leurs plumes, sont transformés en suggestions de couleurs, tandis que la foule qui les regarde à l’arrière est parfaitement détaillée.
Mais William Klein ne s’est pas contenté de photographier les défilés. Il a également capturé des moments du quotidien des Sénégalais. Dans l’une de ces images, une femme traverse la rue alors que la circulation est dense derrière elle, dans une robe blanche diaphane superposée à une robe plus sombre. Bien qu’elle soit à mi-chemin, elle représente un moment de calme au milieu de l’énergie frénétique qui l’entoure.
Alors que l’International Center for Photography accueille une rétrospective de l’œuvre de Klein dans « William Klein: YES », l’exposition chez Howard Greenberg est un excellent complément. En mettant en lumière une série inédite, on découvre un aspect important de son travail, qui servira de base aux films documentaires qu’il tournera au cours des 15 années suivantes. « William Klein: Afrique » capture un moment crucial de la vie et de la carrière de Klein, le tout dans des couleurs éclatantes.
Exposition “William Klein: Afrique“, Galerie Howard Greenberg, New York, jusqu’au 17 septembre 2022.