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LIFE : la photo comme ADN

Pour la seconde fois en Europe, des photos inédites de LIFE sortent des archives pour être exposées et mises aux enchères à Paris. Cette vente intitulée The Golden Years of LIFE porte sur les années dorées de l’Amérique, de la fin du krach boursier de 1929 à la fin des années 1960. L’occasion de revenir sur l’importance de la photographie dans l’histoire du magazine.

Dès 1936 LIFE s’impose comme « le plus grand diaporama sur terre » selon son fondateur Henry Luce. Premier magazine à être véritablement axé sur la photographie, il offre une place de choix aux reportages des plus grands journalistes internationaux. 

Primauté de l’image sur le texte

Rester fidèle à l’image, LIFE en a fait la promesse. Précurseur, le magazine propose une recette puissante : des photographies doublées de séquences narratives prenantes. Le récit s’accompagne invariablement d’images fortes et les photographies apparaissent en grand format. Symboliques ou représentatives, elles renforcent ou contredisent les points essentiels de l’article. Son style informel et instantané donne une impression de proximité et d’authenticité. Transcendant le photojournalisme, les photos de LIFE parlent du monde et surtout au monde.

Ouvriers travaillant sur des tuyaux géants utilisés pour détourner une section du fleuve Missouri lors de la construction du barrage de Fort Peck. Fort Peck, Montana, États-Unis d'Amérique, 1936. Margaret Bourke-White ©The LIFE Picture Collection
Ouvriers travaillant sur des tuyaux géants utilisés pour détourner une section du fleuve Missouri lors de la construction du barrage de Fort Peck. Montana, 1936. Margaret Bourke-White ©The LIFE Picture Collection

Entre joie, regret, horreur ou tristesse, la société américaine découvre le pouvoir émotionnel des images. Pour Bill Shapiro, ancien rédacteur en chef du magazine, la photo intitulée Reaching Out de Larry Burrows témoigne de cet « esprit LIFE ». Datant de la guerre du Vietnam, on y voit un soldat blessé tendre la main à un camarade au sol. « On dirait presque une scène de la Bible, vu la façon dont elle est tournée. C’est si immédiat. Larry Burrows était si proche de l’action qu’il a dû prendre cette photo instantanément. Mais ce qu’il a capturé, c’est quelque chose qui restera dans votre cœur. Vous avez l’impression d’être dans la photo. C’est magnifiquement composé. »

Une ouverture au monde

LIFE s’impose comme la référence absolue du photojournalisme dans le monde. Durant presque un siècle, les reporters américains sillonnent les quatre coins de la planète et marquent des générations. Margaret Bourke-White, Alfred Eisenstaedt, Andreas Feininger, Gordon Parks, ou encore Nina Leen…nombreux sont ceux qui inspirent des vocations. La vente accorde d’ailleurs une place de choix aux images de Pierre Boulat, l’un des très rares photographes français à faire partie de l’équipe du magazine à New York. 

Ouvrière en train de souder une plaque d’acier à l’usine de Blindage de Gary. Gary, Indiana, États-Unis d’Amérique, 1943.
Ouvrière en train de souder une plaque d’acier à l’usine de Blindage de Gary. Indiana, 1943. Margaret Bourke-White ©The LIFE Picture Collection
Ballerines se tenant sur un rebord de fenêtre dans la salle de répétition de l’école de l’American Ballet de Georges Balanchine. New York City, New York, États-Unis d’Amérique, 1936.
Ballerines se tenant sur un rebord de fenêtre dans la salle de répétition de l’école de l’American Ballet de Georges Balanchine. New York, 1936. Alfred Eisenstaedt ©The LIFE Picture Collection

L’utilisation des images par le magazine façonne l’idée moderne de la photographie aux Etats-Unis. Dans les boîtes aux lettres ou dans les kiosques à journaux, les Américains peuvent désormais voir les nouvelles, voir le monde, plutôt que de simplement le lire. Selon Bill Shapiro, cette prédominance de l’image a profondément changé la société : « Je crois qu’il est plus difficile de comprendre la souffrance de quelqu’un d’autre avant de la voir. Lorsque vous voyez des photos qui montrent, comme celles de Mary Ellen Mark, une famille sans abri vivant dans sa voiture, vous ressentez quelque chose. Lorsque vous voyez la photographie de Goebbels assis dans son fauteuil, par Alfred Eisenstaedt, vous percevez ce à quoi ressemble le mal. »  

Mannequin portant robe et gants pendant le salon de mode de la 14 ème rue à New York. New York City, New York, États-Unis d’Amérique, 1951.
Mannequin portant robe et gants pendant le salon de mode de la 14ème rue à New York, 1951. Nina Leen ©The LIFE Picture Collection
Portrait de l’astronaute John Glenn dans une combinaison et casque pressurisée. Floride, États-Unis d’Amérique, 1959.
Portrait de l’astronaute John Glenn dans une combinaison et casque pressurisée. Floride, 1959. Ralph Morse ©The LIFE Picture Collection

Le miroir d’une génération

Sur le papier et dans les mémoires, LIFE fige le temps qui passe. La façon dont ses images mythiques s’ancrent dans nos cerveaux est celle dont nous nous souvenons de l’histoire aujourd’hui. Avec plus de 10 millions d’images dans plus de 100 000 reportages, le magazine détient l’un des plus grands fonds photographique au monde et assure un rôle de mémoire visuelle de la société américaine du 20ème siècle.

Malgré son immense succès, la fin des années 1960 annonce aussi la fin de l’âge d’or de LIFE. La télévision se popularise, renforçant la proximité et l’immédiateté. Le magazine n’a plus l’exclusivité de la première perspective visuelle sur le monde, ce qui faisait anciennement sa réussite. N’offrant plus le meilleur moyen d’atteindre l’ensemble de la population, son lectorat décline. Comme l’affirme Bill Shapiro: « Ce qui a tué LIFE, c’est ce qui lui a donné vie. » Toutefois, l’essor du numérique n’enlève rien à l’héritage de LIFE. Annie Boulat, fondatrice de l’agence de presse Cosmos et épouse du photographe Pierre Boulat, défend la pérennité de la photographie : « L’image ne défile pas, elle est fixe, c’est beaucoup plus fort qu’un film. »

Gros plan du pilote automobile Argentin Juan Manuel Fangio dans son rétroviseur. 1957.
Gros plan du pilote automobile Argentin Juan Manuel Fangio dans son rétroviseur. 1957. Howard Sochurek ©The LIFE Picture Collection
Gros plan sur des néons à Time Square. New York City, New York, États-Unis d’Amérique, 1957.
Gros plan sur des néons à Time Square. New York, 1957. Andreas Feininger ©The LIFE Picture Collection

Entre art et histoire

Festival de Woodstock, Jeux Olympiques, conquête spatiale, Grande Guerre… Le magazine couvre tous les grands événements. Ce 22 septembre, collectionneurs et passionnés de l’autre côté de l’Atlantique pourront acquérir ces pièces mythiques de l’histoire du photojournalisme. La maison Cornette de Saint Cyr propose près de 200 lots de tirages extraits des archives du célèbre magazine. Aujourd’hui vendues aux enchères, les photos de LIFE ont acquis une valeur artistique. La plupart d’entre elles ont pourtant été prises pour capturer l’instant et n’avaient pas vocation à être exposées et encadrées. Le temps transforme les images en des témoignages vivants. Précieux vestiges du passé, les « Golden Years » de LIFE valent de l’or. 

L'acteur Gary Lockwood marche vêtu d’une combinaison spatiale pendant le tournage du film '2001 : l’Odyssée de l’Espace'. États-Unis d’Amérique, 1966.
L’acteur Gary Lockwood marche vêtu d’une combinaison spatiale pendant le tournage du film “2001 : l’Odyssée de l’Espace”. 1966. Dmitri Kessel ©The LIFE Picture Collection

« The Golden Years of LIFE », Vente le 22 septembre 2022 à 18h30, Bonhams Cornette de Saint-Cyr, 6 avenue Hoche, 75008 Paris

Couverture du magazine LIFE
Couverture du catalogue de la vente

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