Paysages arides, diner désert, cowboy en pleine action. Avec « Le Désert américain », Raymond Depardon nous emmène dans un road trip à travers l’Ouest, de Las Vegas aux studios hollywoodiens en passant par Alcatraz. Le photographe dresse le portrait d’une Amérique étrangement familière, celle du début des années 1980, celle qui, dans les esprits européens, vit aux couleurs de l’American Dream. Pourtant, dans l’exposition lyonnaise, les teintes chaudes du Kodachrome qui habillent souvent les Etats-Unis de l’ère Reagan n’ont pas droit de cité. Le noir et blanc, profond et contrasté, règne en maître.
Le livre éponyme de l’exposition, celui qui a inspiré l’événement, est sorti en 1983. Un an après la mort accidentelle d’Olivier Froux auquel l’ouvrage est dédié. L’homme n’était pas seulement le monteur des films de Raymond Depardon, c’était aussi son complice, son ami. C’est avec lui que le photographe-cinéaste avait effectué un des trois voyages qui ont vu naître les images présentées jusqu’au 14 novembre à la Galerie Lumière. « On avait loué une voiture, on avait fait les touristes, cela ne m’était jamais arrivé de ma vie », se souvient Raymond Depardon dans les colonnes du Progrès.
En 1981, date de ce voyage, le cofondateur de l’agence Gamma avait déjà roulé sa bosse aux Etats-Unis. De son premier passage, en 1963, alors qu’il avait 21 ans, il n’avait rapporté aucune image, trop impressionné qu’il était de découvrir New York. Cinq ans plus tard, il couvrait la convention nationale démocrate, mais aussi la contestation de la guerre du Vietnam et la campagne présidentielle de Nixon. Et, au début des années 1970, il passe plusieurs mois à Los Angeles, immortalisant des stars telles que John Wayne ou encore Henry Fonda.
Si l’on se souvient souvent de Raymond Depardon pour son travail tant photographique que filmique sur la justice (Faits divers, 1983), la ruralité (Profils paysans, 2001 à 2008) et la santé mentale (San Clemente, 1982, Manicomio, 2013), les Etats-Unis tiennent aussi une place notable dans l’œuvre du photographe de Magnum. En 2018, les Rencontres d’Arles présentaient l’exposition « Depardon USA. 1968-1999 » assortie d’un livre publié chez Atelier EXB où figurent certaines des images présentées aujourd’hui à Lyon. La même année, Raymond Depardon revenait au micro de France Culture sur sa fascination pour les grands espaces étatsuniens. « Les Américains ont toujours montré le désert comme à travers le western. C’est toujours un challenge de photographier le désert. » Un challenge que Raymond Depardon a relevé avec brio.
« Le Désert américain », exposition de Raymond Depardon à la Galerie Cinéma de l’Institut Lumière, Lyon 8e. A voir jusqu’au 28 novembre 2021.