Célèbre photographe de mode, Richard Avedon est l’un des plus grands portraitistes de l’histoire. Harper’s Bazaar, Vogue, Life and Look… sa patte reconnaissable inonde les publications de mode. Dans son studio New Yorkais, le temps s’arrête. Visage figé dans une pose sophistiquée. Du photographe ou du modèle, on se demande qui est le plus concentré. En une fraction de seconde, le flash aveuglant capture cette épiphanie. La photo est réussie, on range. Alors, à l’abri de l’appareil, les traits se défont de leur artificialité. La vie reprend.
Richard Avedon a toujours eu une préférence pour le travail en studio. « Il isole les gens de leur environnement. En un sens ils deviennent… des symboles d’eux-mêmes », écrivait-il. Le fond blanc de son studio s’apparente à la première page vierge d’un carnet qu’on noircirait avant de le délaisser sciemment, éternellement inachevé. Car si Avedon photographie avec justesse les icônes de son époque, il ne saisit que la surface. Et c’est tant mieux. Il perçoit la beauté qui se présente à lui, la magnifie et la fixe magistralement. Son œil est à la fois le témoin et le créateur des icônes qui se trouvent devant lui.
Parmi le flot de sa production photographique, un portrait fait exception. Une photographie où il semble enfin avoir percé la surface de son sujet. Une des images les plus marquantes de sa carrière : son portrait de Marilyn Monroe, en 1957. Ce n’est pas l’installation habituelle, les flashs laissent place à une lumière plus douce, plus intime. Marylin peut redevenir la petite Norma Jeane, les épaules affaissées et le regard flottant dans le vide. Richard Avedon le sait, cette photo est unique. Comme si l’appareil, par la distance qu’il impose entre les deux individus, avait ce pouvoir insolite de briser le quatrième mur. Il écrivait ainsi : « Les photos ont pour moi une réalité que les gens n’ont pas. C’est à travers les photos que je les connais. »
En préface du livre « Avedon 100 », publié à l’occasion du centenaire de la naissance du photographe emblématique, Larry Gagosian écrit : « Chaque photographie d’Avedon n’est pas seulement le portrait d’une personne, mais aussi celui d’une idée. » Il suffit finalement d’une idée pour écrire l’histoire. Une idée un peu folle, comme celle qu’Avedon a mis en exécution en 1955, alors qu’il travaillait pour le célèbre magazine Harper’s Bazaar. Carmel Snow, rédactrice en chef d’Harper’s Bazaar demande au photographe de l’accompagner pour réaliser une série d’images, à l’occasion d’un reportage sur Paris et la mode parisienne. En plein cœur du Cirque d’Hiver, à Paris, il photographie Dovima, une des mannequins les mieux payées de l’industrie à l’époque. Elle pose dans une robe de soirée noire Dior, entourée de deux éléphants. Élégante, dramatique, cette image reste l’une des photographies de mode les plus emblématiques de tous les temps.
« Iconic Avedon, A Centennial Celebration of Richard Avedon », exposition de photographies de Richard Avedon à la Galerie Gagosian (Rue de Ponthieu, Paris), jusqu’au 2 mars 2024.