« Ce terme, pays de survol, était un mot que j’avais entendu toute ma vie, mais auquel je n’avais jamais vraiment réfléchi en ce qui concerne la condescendance qu’il impliquait. J’avais le sentiment que cette partie de notre pays avait été ignorée politiquement, socialement et culturellement pendant des décennies, son obscurité créant un vide subtil mais conséquent qui avait implicitement alimenté nos divisions nationales. Je savais que, pour découvrir ce qu’est l’Amérique, je devais parcourir son corridor central et le voir par moi-même », écrit le photographe Richard Sharum dans son introduction à Spina Americana, publié par GOST Books.
Sharum n’est pas le premier photographe à parcourir les routes secondaires et les endroits méconnus de l’Amérique pour voir de quoi est fait ce pays. Et il ne sera pas le dernier. Tant qu’il y aura des voitures et des appareils photo, quelqu’un associera bien les deux pour voir où la route le mènera et ce qu’elle pourra lui révéler.
Mais l’Amérique a encore beaucoup à dévoiler à ceux qui regardent et explorent. La « colonne vertébrale » de l’Amérique, comme l’appelle Sharum, est une bande de 100 miles de large qui traverse le centre du pays, couvrant des parties des Dakotas, du Kansas, du Nebraska, de l’Oklahoma et du Texas. Elle englobe de nombreuses régions distinctes du pays, tant sur les plans géographique, politique que culturel.
Elle abrite des personnes aux racines culturelles variées, toutes faisant partie du grand mélange qu’est ce pays. Ce sont des mécaniciens, des policiers, des agriculteurs, des éleveurs, des prisonniers, des danseuses exotiques, des politiciens, des ouvriers agricoles, des nudistes, des mennonites, des luthériens, des suprématistes blancs, des républicains et des démocrates. Tous jouent leur rôle dans ce pays et ont un rôle à jouer dans ce que l’Amérique est et deviendra.
Au cours de ses voyages sur trois ans à travers ce corridor, Sharum a parlé à plus de 4000 personnes et pris plus de 14 000 photographies. Comme il l’écrit : « Spina Americana n’est pas simplement une étude d’une région et de ses habitants, mais une tentative de documenter cette communauté, combinée à l’espoir de fournir un miroir dans lequel les Américains peuvent se regarder, voir qui ils sont et où ils pourraient se situer dans ce moment historique actuel. »
L’Amérique se trouve actuellement à la croisée des chemins, prise entre des forces concurrentes qui cherchent à mener le pays dans des directions très différentes. Sharum a passé plusieurs années et parcouru de nombreux kilomètres à documenter la vie de ces populations qui influencent souvent les élections américaines, comme ce fut le cas il y a quelques semaines. Des questions comme l’immigration, les tarifs douaniers, les impôts et l’inflation auront des impacts majeurs sur les moyens de subsistance de ceux qui vivent et travaillent au centre du pays.
Est-il aujourd’hui possible de guérir les divisions dans le pays ? Est-il possible pour les deux camps de se réunir ? L’Amérique peut-elle redevenir unie ? « En tant qu’Américains, notre devoir, je crois, est de toujours nous rappeler qu’à la fin, la seule chose qui sépare notre honneur de la poussière balayée par le vent d’un empire effondré, c’est nous », dit Richard Sharum. « Mon espoir est que ce travail, et celui à venir, servira d’appel à l’action pour les individus convaincus qu’ils sont impuissants face aux forces qui s’opposent activement à ce type de cohésion nationale. »
Spina Americana est publié par GOST books. Il est diponible ici au prix de 55€.