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Un drame capverdien en clair-obscur

Avec l’ouvrage Vitalina Varela – Caderno de Rogadem, Pedro Costa propose un autre regard sur l’histoire de l’actrice principale de son film récompensé du Léopard d’or à Locarno en 2019.
Pedro Costa
© Pedro Costa

« Parler de la photo de film ne revient pas à parler de la photo : c’est une espèce à part, hybride, qui ne se réfère pas à la réalité et n’a de valeur que comme extrait, comme souvenir du film, comme objet de collection » écrivait le journaliste et écrivain Hervé Guibert. Avec l’ouvrage Vitalina Varela – Caderno de Rogadem édité par Pierre Van Kleist, l’objectif est tout autre pour le réalisateur Pedro Costa qui souhaitait garder des traces des méthodes de travail utilisées lors du tournage de son neuvième long-métrage.

Vitalina Varela, c’est également le nom du film (Léopard d’or à Locarno en 2019) et de l’actrice principale, une Cap-Verdienne de 55 ans, dont la vie réelle a inspiré l’intrigue. Quand Pedro Costa rencontre cette femme, elle est arrivée à Lisbonne quelques jours après les obsèques de son mari Joaquim. Benjamine d’une famille de huit enfants, elle a épousé ce Joaquim, son premier amour, ce garçon du même village qu’elle, qui après leur mariage a quitté le Cap-Vert pour le Portugal. En 35 ans, il n’est revenu que deux fois la voir, lui promettant à chaque fois de lui envoyer un billet pour qu’elle le rejoigne. Le film raconte la vie de Vitalina, ses souvenirs, son passé, son histoire dans une fiction qui brouille les pistes entre réel et imaginaire. 

Pedro Costa
© Pedro Costa
Pedro Costa
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Pedro Costa
© Pedro Costa
Pedro Costa
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Cette histoire d’amour et d’espoir, magnifiée par les plans de Pedro Costa, a été filmée entre le Cap-Vert, Lisbonne et la maison où Vitalina se trouvait quand le réalisateur l’a rencontrée. Dans un entretien accordé au journal français Le Monde, Pedro raconte qu’il savait que ce serait « un film très intérieur dans cette maison pas très habitable, sans fenêtre : c’est une boîte, une maison de maçon où l’on dort. » Pour arriver à l’intensité du clair-obscur employé, le réalisateur aidé par son directeur photo ont utilisé des installations de miroirs pour attraper un peu de soleil.

C’est ce même clair-obscur que l’on retrouve dans les photographies en noir et blanc prises par Pedro Costa et d’autres membres de l’équipe dans l’ouvrage Vitalina Varela – Caderno de Rogadem. Elles montrent des scènes du tournage mais aussi Vitalina, seule, face à son drame, face à sa quête. Certaines images laissent songeur, elles sont traversées par une immense mélancolie. Il semble qu’ici les photographies de tournage ne sont pas que des souvenirs mais existent par elles-mêmes. Elles racontent à leur tour une autre histoire. L’histoire d’un film mais aussi de cette femme, Vitalina Varela, où la frontière entre réel et imaginaire devient encore plus infime.

Vitalina Varela – Caderno de Rodagem de Pedro Costa et autres est publié par Pierre Von Kleist Editions, 80 pages, 25 €.

Pedro Costa
© Pedro Costa
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