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Jérémie Villet, trouver le loup

Le photographe débusque une jolie galerie d’animaux depuis son enfance. À 22 ans, il s’apprête à publier son premier livre.

Du livre Première neige © Jérémie Villet

De ses aventures, Jérémie Villet en parle avec une légèreté qui amuse et fait rire. Il a toujours le mot pour plaisanter, esprit espiègle qu’il semble être, tandis qu’il fait le récit d’une journée avec des aigles dans le froid polaire de l’Alaska. Parfois, il doit supporter des températures qui frôlent les moins 40°C alors que rôdent des ours dans les parages. C’est sans doute avec eux que Jérémie est le plus sérieux. Il les évite absolument, car l’ours a cette fâcheuse manie de s’attaquer à l’homme et va, parfois, jusqu’à le dévorer vivant. Sinon rien ne fait vraiment peur à Jérémie Villet. Le loup ? Un peu, à la rigueur, quand il se retrouve à passer une nuit seul avec lui et encore… C’est surtout la beauté de cet instant que retient le photographe. « Le loup impose une présence incroyable » témoigne-t il, « quand il y en a un dans le coin, vous le sentez tout de suite ». Et de raconter comment les autres animaux se comportent alors, se déplaçant de telle façon par exemple pour éviter de rencontrer le prédateur. 


Du livre Première neige © Jérémie Villet

Renard polaire 

Comme un prédateur, justement, Jérémie Villet avance parfois. Il explique qu’il est nécessaire de temps à autre de pister une proie pour attraper avec son appareil photo l’animal qui la chasse. C’est le cas du renard polaire que Jérémie Villet a longtemps traqué. Il suivait des poules de neige et des lapins blancs pour lui tomber dessus. C’est finalement en mettant ses propres aliments autour de sa tente qu’il parviendra à en rencontrer un. « Il était extrêmement furtif » précise le photographe, « j’ai fait exprès de ne pas m’approcher de lui quand je l’ai vu, sinon il aurait aussitôt disparu ». Souvent les animaux qu’il poursuit lui échappent. « J’ai raté beaucoup de photos », admet- il. Mais celles qu’il réussit sont d’autant plus fortes du fait de leur rareté. Elles sont l’aboutissement d’un long périple et d’une histoire personnelle peu ordinaire. « Cette photo, c’est six mois de ma vie », dit Jérémie Villet, un peu surpris par lui-même. 


Du livre Première neige © Jérémie Villet

Premier acte 

Une vie qu’il voue volontiers à cette passion de prendre en photographie l’animal. Tout commence quand il est enfant alors que ses parents sont agriculteurs en région parisienne et qu’ils vivent dans une ferme située à côté de la forêt de Rambouillet. « La nuit, j’entendais les cerfs bramer », se souvient Jérémie, « un jour, mon frère et moi avons demandé à nos parents si nous pouvions aller dormir dans les bois pour voir des cerfs ». Ils le font. Dans la cour d’école, personne ne les croit quand ils racontent cet exploit. « Alors, nous y sommes retournés avec un appareil photo, pour prouver qu’on les avait bien vus ! », lance Jérémie, amusé encore. Ils reviennent avec des photos floues, sur lesquelles il est difficile de deviner l’animal, sinon ses grandes ramures qui se déploient dans le brouillard. Mais c’est déjà un premier acte pour le futur, là où il noue un pacte secret avec lui-même : devenir un photographe animalier. La difficile réalité du métier lui fera d’abord préférer faire des études de lettres, mais très vite sa passion le rattrape. Il gagne un concours et s’envole vers des contrées lointaines. 


Du livre Première neige © Jérémie Villet

Neige 

Jérémie n’aime pas dire l’endroit exact où il se rend, car il craint que ces lieux isolés deviennent des nids à touristes, peu respectueux de l’environnement. Il ne reviendra d’ailleurs pas pour l’instant dans l’Himalaya où il s’est rendu pour obtenir une image d’une panthère des neiges. Il y a désormais trop de visiteurs qui brouillent le silence et la pureté que recherche le photographe. Il faut dire que Jérémie Villet s’est fait une spécialité de rendre la blancheur d’un territoire, de révéler la splendeur immédiate d’un amas de neige. Sur un bon nombre de ses photographies, les animaux apparaissent comme sortis tout droit d’un rêve, les jambes effacées par les reflets de la neige, comme surgissants, des apparitions. D’ailleurs, Jérémie appelle souvent les animaux qu’il piste des « fantômes ». C’est le cas du lynx qu’il traque sans relâche depuis des années. « Je n’ai toujours pas fait une bonne photographie de lynx. J’en ai vu, mais il disparaît aussitôt. », confie-t-il. Raison de plus pour continuer à voyager à travers le monde, dans les paysages les plus froids, les plus lointains. Des paysages et des animaux qui sont les vedettes de son tout premier livre, intitulé Première neige. 

Car, bien que jeune, Jérémie Villet a déjà une sacré collection d’instants rares qui disent combien le sauvage est précieux, le primitif, important. Combien l’image d’une bête suffit à émerveiller l’enfant qu’il est resté. 


Du livre Première neige © Jérémie Villet

Du livre Première neige © Jérémie Villet

Du livre Première neige © Jérémie Villet

Du livre Première neige © Jérémie Villet

Première neige, Jérémie Villet, à paraître le 14 octobre 2020 aux éditions du Chêne.

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